Et vous, connaissez-vous La Fourchette égarée ?

Ce mois-ci, nous vous parlons frites et burgers en mode nomade : nous avons partagé un moment avec David, patron de La Fourchette égarée, un food-truck qui fait escale, depuis trois ans, à Villers-le-Bouillet et en région Huy-Waremme. De quoi nous donner l’eau à la bouche…

Parle-nous de ton parcours professionnel : comment un restaurateur parisien d’origine normande a-t-il atterri dans notre campagne villersoise ?

Au total, j’ai travaillé 32 ans dans le milieu de la restauration, en touchant un peu à tous les domaines : brasserie, brasserie de luxe, restaurant traditionnel, restaurant gastronomique, service traiteur, gestion de personnel, le tout entrecoupé d’un voyage aux Etats-Unis, en Californie, dans la restauration française. Les dernières années où j’ai travaillé à Paris, je gérais un restaurant de cuisine française traditionnelle dans un concept atypique : on servait les boissons, dans des biberons, les grands crus au verre. Dans le milieu de la restauration parisienne, on gagne bien sa vie mais la cadence est très soutenue, c’est un rythme métro boulot dodo qui ne me convenait plus. J’avais envie de nature, de changement. Ma sœur était sans emploi à l’époque et on s’est dit qu’il y avait là une opportunité de faire quelque chose. La question s’est posée de retourner en Normandie ou de venir en Belgique puisque ma compagne est Belge. Voilà comment je suis arrivé ici, dans un lieu inconnu pour relancer une activité dans un domaine que je connaissais bien.

Pourquoi avoir choisi un food-truck au lieu d’un commerce fixe ? N’est-ce pas une contrainte ?

Nous avions envie de travailler sans embaucher de personnel, ce qui est inévitable quand on a restaurant. J’avais aussi envie de rester dans le côté américain du burger (même si à l’origine le hamburger vient d’Allemagne) en proposant de servir notre carte dans un vrai camion américain. En Belgique, on est bien sûr tributaire du temps et il y a des clients qui sont vraiment courageux de venir au camion quand il pleut ou qu’il fait froid ! Mais surtout, il y a des difficultés auxquelles on n’était pas vraiment préparé, notamment parce que les habitudes en Belgique et en France sont différentes : en France, il n’est pas inhabituel de faire deux repas chauds par jour et de manger pour 8 ou 10€ à midi, ce qui semble cher à un Belge, surtout pour manger à l’extérieur. Les Belges ont aussi moins de temps qu’en France pour manger à midi. Heureusement, on compense avec le service du soir, les repas de société et les événements du week-end. Les gens apprécient d’avoir un concept original pour leur repas lors d’occasions spéciales, comme les anniversaires ou les communions… Mais, même au bout de trois ans d’activité, c’est clair que ce n’est financièrement pas facile…

Ce type de restauration est un peu une mode. N’as-tu pas peur de la concurrence ?

Justement, de la concurrence entre food-truck, il n’y a en pas assez ! C’est donc compliqué de faire entrer le concept dans les mentalités. Il y a des villes qui interdisent les food-truck sur leur territoire, d’autres qui sont réticentes parce qu’elles sont déjà « saturées » par les restaurants et d’autres encore où les emplacements sont hors de prix ! Ce qui est surtout difficile, c’est de trouver les bons emplacements qui soient à la fois intéressants par leur nombre de clients et leur visibilité sans donner l’impression aux restaurateurs du coin qu’on vient leur faire concurrence. Et ça non plus, ce n’est pas facile… En plus, en Belgique, on a cette image de friterie qui reste dans l’imaginaire des clients !

La particularité de ton food-truck, c’est que tout est « fait-maison », avec des produits frais. Comment t’organises-tu ?

La mise en place est quotidienne, ça demande beaucoup de travail et d’organisation. On est très attentif à la météo du jour, on calcule, on estime le nombre de clients. Certains clients ont aussi pris l’habitude de passer commande, ce qui est positif pour limiter au maximum le gaspillage. Mais on n’est jamais à l’abri d’une mauvaise estimation…

Et les produits que tu utilises, comment les sélectionnes-tu ?

Notre volonté, c’est de proposer uniquement des produits frais de qualité sans pour autant exploser les prix et, de ce côté-là, ça reste une difficulté majeure. En arrivant en Belgique, j’ai été étonné de voir que les prix au kilo sont relativement élevés, même en vente directe auprès du producteur ! Ce n’est pas le cas en France et c’est pourquoi, au départ, j’ai continué à me fournir auprès de petits producteurs français. C’est paradoxal : on essaie de redonner goût aux gens, de mettre la qualité et le local au centre de leur assiette et on explose les prix… Actuellement, je fais toujours venir les fromages directement de France car ceux que je propose dans mes burgers, comme le Neufchâtel ou la tomme de Savoie par exemple, ne sont pas produits ici. Après avoir beaucoup démarché, j’achète ma viande directement dans un abattoir de la région. Les vrais pains « buns », qui sont très difficiles à trouver sur le marché, sont fabriqués artisanalement, selon ma recette personnelle, par la boulangerie Grégoire de Verlaine. Et les deux variétés de quinoa que j’utilise dans mes burgers végétariens sont produites par Quinobel à Saint-Georges-sur-Meuse.

Puisque tu parles de tes burgers végétariens, ont-ils autant de succès que tes burgers de viande ?

Le burger végétarien passe de mieux en mieux auprès des clients : au départ, les gens ont des difficultés à franchir le pas mais, une fois que c’est fait, ils apprécient. Par contre, il ne faut pas croire que c’est moins cher à la fabrication parce que c’est végétarien : les ingrédients que nous utilisons ont un certain coût.

Tes frites ont également une particularité…

Nous épluchons nous-mêmes les pommes de terre, les frites sont coupées à la main et blanchies par nos soins. Pas de sous-vide, ni de précuit chez nous ! Mais surtout, nous les cuisons à la graisse de canard. Cela peut sembler étrange mais les frites ne sont pas grasses et, surtout, c’est la seule graisse qui a l’avantage, en plus d’avoir une bonne montée en température, de ne pas boucher les artères ! Et puis, cette particularité nous a permis de sortir du concept de la frite belge traditionnelle.

Merci à David pour cette interview très instructive et riche en débats. Nous vous invitons à faire un arrêt devant le food-truck de La Fourchette égarée car goûter ses burgers et ses frites, c’est les adopter ! La Fourchette égarée vous accueille dans notre commune le mercredi soir à Vaux-et-Borset à partir de 18h30 et le jeudi midi sur le parking des Fonderies Fallais de 11h30 à 14h30. Pour tous les autres arrêts du Food-truck et les événements, rejoignez sa page Facebook et visitez son site internet !

Reporters en herbe :

Marie Vandeuren et Donat Delhaye